Une journée de fous. Cela avait été une journée de fous. Pas un seul moment de répit. Même pas une pause café, vous vous rendez compte ?! A ce rythme là, Agatha allait finir sur les genoux. Le Gotham News, le premier journal de Gotham, là où les informations doivent apparaître en premières, là où tout doit être révélé avant tout le monde. Et être le premier entrainait certaines conséquences, des dommages collatéraux dirons nous, manque de sommeil, stress, hypertension suite à une overdose de café. Des dégâts mineurs pourrait penser le rédacteur en chef, il faut suivre la cadence de l'information, si on est dépassé, c'est qu'on est pas fait pour être journaliste dans un journal de choix, c'est que la seconde zone nous correspondait plus. Agatha avait été habituée à cet environnement de pression constante où être partout en même temps devait être une seconde nature. A tel point que certains policiers commençaient à se demander si elle n'avait pas des pistons avec des personnes peu fréquentables et pourtant, seuls ses informateurs et le rédacteur en chef lui disaient où il fallait être, à quel moment pour être en pôle position. C'était limite un sport tout ça. Quoiqu'il en soit avec la disparition du Batman, ce n'était pas les faits divers qui manquaient. L'insécurité qui régnait à nouveau à Gotham avait grippé un flèche. Les criminels se sentaient bien plus tranquille, comme si la police ne leur posait aucun problème. A croire que l'arrestation du Joker n'avait pas eu d'influence pour les cowboys du 21ème siècle. Batman avait fait couler pas mal d'encre, son absence en fait couler encore plus. Et la jeune femme ne savait pas trop ce qui était le mieux... Etant en première pour savoir tous les horreurs qui pouvaient se passer dans cette ville, avoir quelqu'un pour les protéger n'étaient finalement pas du luxe finalement.

Toute la journée, Agatha passait de son pc pour écrire un article, pour ensuite le présenter au rédacteur en chef et pour ensuite aller piocher dans ses sujets en retard. Une pile de feuilles s'entassait dangereusement sur son bureau. Une tour de Babel de papier menaçait de s'effondrer si la journaliste n'accélérait pas la cadence de frappe. Les principaux sujets, agressions, chômage, discours du maire, le procès tant attendu du Joker. Des sujets tous absolument déprimant, de quoi se jeter par la fenêtre de 15ème étage histoire de ne plus se désillusionner davantage. Mais aussi étrange que cela puisse paraître, Agatha n'avait pas la sensation d'être affectée à toute cette souffrance, elle en avait tellement vu des vertes et des pas mûres dans sa carrière, bien qu'encore courte, de journaliste mais aussi avec son passé dans les bas fonds. Elle avait dû apprendre à faire la part des choses et si elle devait se morfondre dès qu'elle écrivait un article sur la criminalité à Gotham, elle pouvait démissionner tout de suite, il ne faudrait pas longtemps pour que le Gotham News la remplace. Elle avait dû apprendre à se forger une carapace, qu'une fois qu'elle commençait à écrire, plus rien ne devait l'affecter, sinon c'était le début d'une longue, très longue descente vers les ténèbres, vers l'enfer que devenait Gotham. Enchaînant, les divers sujets que lui avait confié le rédacteur en chef, Agatha ne vit pas le temps passé, regardant alors sa montre, il allait bientôt être 19h00. L'équipe du soir n'allait pas tarder à arriver et relayer ceux de la journée. Le journal continue à tourner toute la nuit. Ceux de la journée s'occupaient de l'édition du soir et ceux de la nuit de celle du matin. Pas question de laisser des heures sans personne pour rédiger, la nuit les informations continuent d'affluer. Les journalistes en open-plan devaient ranger leurs affaires pour laisser la place aux autres. Heureusement Agatha n'avait plus ou moins plus ce problème, elle était une des rares privilégiés à avoir un bureau ou presque. Un bureau avec quatre murs qu'elle devait partager avec un stagiaire quand elle avait un stagiaire mais aussi avec un autre journaliste, assis juste en face d'elle.

Agatha ferma son ordinateur et attrapa son trench. Elle salua tout le monde, se dirigeant vers l’ascenseur. Les rues de Gotham étaient encore bien animées malgré l'heure qui se faisait tardive. Le quartier des affaires était toujours animé la journée, un des quartiers les plus surs de la ville. La jeune femme n'était pas mécontente d'avoir pu y emménager. Surtout qu'au moins, même le métro, le moyen de transport le plus dangereux de Gotham la nuit, était d'une sûreté déconcertante. Même en mini jupe et talons, Agatha ne craignait pas de se faire agresser. Le métro était rempli d'hommes et de femmes d'affaire en costume et tailleur. Trop de témoins pour que quelqu'un se fasse voler ou frapper. La jeune femme descendit à son arrêt et marcha jusqu'à chez elle. Un immense bâtiment, comme tous les autres de la ville, un bâtiment de verre et de béton, aussi froid qu'esthétique. Elle fouilla alors dans son sac à main afin de trouver sa précieuse clé qui avait pour habitude de se faire la malle, comme tout objet dans le sac d'une femme. Elle regarda à son courrier, rien de bien important, de la pub, de la pub et... A oui encore de la pub. Ah non c'est bon il y a le journal entre deux publicités, miracle ! Agatha prit l'ascenseur jusqu'à sa porte et entra, soulagée, dans son appartement. Enfin chez soi ! Ca n'avait pas de prix. La jeune femme retira ses talons, libérant ses pieds de cette torture féminine, bien qu'on s'y habitue rapidement. Premier réflexe de la journaliste qu'elle était, Agatha s'approcha de son canapé, attrapa la télécommande pour allumer la chaîne d'informations en continue. Même si elle n'écoutait pas vraiment, ça faisait toujours un fond sonore. Puis elle se rua vers la cuisine, elle n'avait quasiment mangé que liquide, il fallait qu'elle remplisse son ventre qui criait famine. A force, la jeune femme se demandait si elle n'allait pas avoir plus de café dans les veines que de sang... Alors qu'un choix cornélien s'offrit à elle, se faire à manger de manière équilibrée et attendre 2h avant de manger et de se faire des pâtes le repas du célibataire fainéant, on frappa à la porte de l'appartement. Chose étrange, Agatha n'attendait personne, ça devait sûrement être son voisin de palier. Entre deux célibataires de plus de 25 ans, ils leur arrivaient de passer quelques soirées ensembles, en bons amis, histoire de pas se faire un plateau télé déprimant. Mais contrairement à toute attente, ce fut le policier John Blake qui se trouvait derrière la porte. Agatha ne put s'empêcher de cacher sa surprise, ne s'attendant pas à le voir débarquer chez elle. Déjà comment il savait qu'elle habitait là ? Et après c'était elle qui lui courrait après, c'était l'hôpital qui se fout de la charité. Agatha afficha toutefois un sourire, mi poli mi amusé, et lança alors au policier.

« Que me faut se plaisir inspecteur Blake ? »

Agatha&John
" Pourquoi vous êtes toujours là ? "

Je me retrouvais face à elle, son habituel sourire sur le visage. Elle avait toujours l'air joyeuse, même sur une affaire atroce elle est contente, sûrement que le fait d'avoir les infos avant tous le monde doit lui procurer une certaine jouissance. Pas un bonjour, pas même un simple salut, la porte ouverte que direct elle m'avait demandé ce que je faisais là. Je comptais bien être sincère envers elle, après tout j'étais venu pour des réponses et je comptais bien les avoirs par n'importe quel moyen. Même si pour ça j'allais devoir jouer les dragueurs et lui faire croire des choses « Bonsoir Mlle Eddowes, désolé de vous dérangez à cet heure si tardive mais j'aurais quelques questions à vous posez. » Je n'étais même pas en tenu de travail, j'étais habillé comme un simple civil. Je n'allais certainement pas être crédible, après peut être qu'elle ne ferait pas attention et que je pourrais tout lui demander tranquillement.

On était toujours sur le palier de sa porte, ce n'était certainement pas un lieux bien pratique pour une conversation comme celle qu'on allait avoir. Je tenais toujours mon sac de vêtement dans la main, je ne me sentais pas spécialement à l'aise, j'allais en quelque sorte pénétré dans sa vie privée, mais je n'étais pas le seul à vouloir connaître son secret « Si je suis là, c'est surtout parce qu'on aimerait savoir comment vous faites pour être toujours sur les lieux même avant la police ? Lorsqu'il se passe quelque chose dans la ville, on peut être sur que vous serez la première journaliste. En tant que journaliste, vous êtes bien placer pour savoir qu'on doit se méfier de tous le monde ici. Je ne vous demande pas de nous donner vos sources. On veux juste savoir si vous avez des liens avec les crimes à chaque fois ou si c'est juste un coup de chance. » Des coups de chances ? Je ne pense pas non. Même avec la plus grande chance au monde, on ne peut pas tout connaître avant tous le monde, on ne peut pas être présent avant la police et même Batman lui même n'est pas aussi fort pour ça. Trop de secret, la ville elle même est un immense secret. Chaque citoyens de cette ville cache quelque chose. Secret story ? C'est de la merde à côté de Gotham.

Je continué de regarder Agatha dans les yeux, je ne voulais pas qu'elle voit que je n'étais pas à l'aise « Je sais que ce ne sont pas mes affaires, mais on se pose quand même beaucoup de question. J'en suis vraiment désolé. »

Il fallait bien avouer qu'à cet instant précis, Agatha ne se montrait pas en parfaite maitresse de maison, enfin d'appartement. Mais la surprise de croiser l'inspecteur Blake devant sa porte fut suffisamment importante pour qu'elle oublie même les bonnes manières. Surtout qu'il était en civil, la journaliste ne le connaissait que sous son uniforme bleu de la ville de Gotham. Le voir ainsi devant sa porte était assez surprenant et très inattendu. De manière générale, ça aurait plutôt été Agatha qui se serait pointée chez lui pour avoir un complément d'informations sur une enquête, pas l'inverse. Mais comme quoi impossible is nothing. L'inspecteur se montra très courtois et la jeune femme n'en fut que plus intriguée. Habituellement, c'était elle qui harcelait le jeune homme pour qu'il réponde à ses questions. Sur chaque lieu de crime, dès qu'Agatha voit Blake, c'est vers lui qu'elle se dirige directement. Il était encore assez « jeune » dans le milieu de la police, pas encore très haut gradé il pouvait plus facilement répondre à ses questions, même si sa hiérarchie devait lui dire de se la fermer purement et simplement. Il n'était pas comme un commissaire qui ne fait que remballer les journalistes présents. Et même si ce n'était que pour parler meurtre, vol et violence, c'était plutôt agréable de discuter avec l'inspecteur Blake, non pas seulement parce qu'il était aussi physiquement intelligent. Lorsque le policier lui demanda s'il pouvait lui poser quelques questions, la jeune femme hocha la tête et lui répondit qu'il n'y avait pas de soucis. De toute façon, il est toujours très mal vu de dire non à un inspecteur. Si on n'a rien à cacher à la police, autant lui répondre ça sera toujours moins suspect que de pas vouloir. Même les innocents doivent montrer patte blanche.

Agatha pensait proposer de rentrer pour éviter de rester des heures sur le pallier. Ca serait bien plus courtois et moins embarrassant de se faire surprendre en plein interrogatoire par un voisin de pallier ou une autre personne vivant dans l'immeuble. Quoique vu la tenue civile, personne ne se douterait que Blake était un policier. Et enfin la question tomba. Mais c'était surtout la remarque qui accompagna la question qui blessa profondément la journaliste. Alors quoi ça y est, on est sur les lieux du crime pour pouvoir faire la Une avant tout le monde et c'est suspect. Le sourire de la jeune femme disparut en quelques secondes. Elle qui était toujours optimiste, souriante, qui essayait de mettre un peu de gaité dans ce monde de brutes. A croire que la bonne humeur et la ponctualité pouvaient maintenant être condamnable. L'envie de faire entrait l'inspecteur chez elle pour pouvoir discuter tranquillement diminua d'un seul coup. Pour elle, il n'était plus vraiment question qu'il entre chez elle, une maison, un appartement, c'est une part de l'intimité de chacun. Et il n'était pas question qu'elle laisse entrer chez elle quelqu'un qui avait de telles idées sordides sur son sujet. La jeune femme croisa les bras sur sa poitrine, les traits de son visage se durcissant. Agatha pouvait avoir son air de bisounours mais c'était une très mauvaise idée de la croire simplet. Elle détourna le regard, le temps d'encaisser cette critique plus que désobligeante sur elle, sur son sérieux. Au final, une réflexion plus que déplacée, était ce de sa faute si la police mettait 30 ans avant d'arriver sur les lieux d'un crime ? La journaliste sentait sa colère bouillir doucement en elle, elle essayait de la contenir le plus possible, passer ses nerfs sur un membre des forces de l'ordre ce n'était jamais vraiment conseillé. Mais le dernier commentaire conciliant la mit hors d'elle. Là ça en était trop, là il fallait qu'elle explose. Agatha lança un regard noir à John et répliqua de manière agressive et particulièrement froide.

« Veuillez m'excuser alors de bien faire mon boulot ! C'est de ma faute si dans la police vous n'êtes pas capables d'arriver avant. Excusez moi si c'est suspect d'être là pour savoir, si on arrive pas avant vous on peut laisser la Une dans un placard ! Oui j'ai des informateurs dans Gotham, des personnes fréquentables et d'autres beaucoup moins. C'est de manière grâce à eux que je sais tout ce qui se passe dans cette ville. Mais je sais pas ce qui c'est passé dans votre tête pour ne serait ce seulement imaginer un truc pareil ! C'est pas parce l'arbre est mort que tous les fruits sont forcément pourris. »

Agatha ne supportait pas cette idée reçue de la plupart des gens de Gotham. Si on connait des gens peu honnêtes, pour ne pas dire autre chose, c'était qu'on avait quelque chose à cacher. La jeune femme venait de ce milieu défavorisé, où il vaut mieux parfois avoir les pires fréquentations possibles et imaginables pour rester en un seul morceau. Mais ce qui l’énervait le plus voir que ceux qui n'avaient jamais vécu dans la misère que pouvaient être les basfonds de Gotham s'imaginer qu'une fois qu'on vient de là, on est pourri et qu'il est impossible de s'en sortir. Que si Agatha était la plupart du temps avant la police sur les lieux d'un crime, c'était sûrement qu'elle devait avoir un lien avec l'affaire. A croire qu'une étiquette lui était épinglée à vie... Après avoir craché tout son venin sur l'inspecteur Blake, Agatha laissa la pression retombée, presque maintenant honteuse de lui avoir parlé aussi sèchement. Elle s'était laissée emporter mais elle n'aurait pas su garder son calme habituel, là il fallait qu'elle sorte de ses gongs. Toujours les bras croisés, la journaliste regarda le policier, son regard n'était plus sombre, c'était plutôt un regard de désillusion, de déception qu'elle lui lança. Elle finit alors par souffler, plus pour elle que pour John.

« J'arrive pas à croire que vous ayez pu penser ça... »